samedi 31 octobre 2015

Some thoughts on the weight of places in video games

"Like dreams, video games stage theatres of individual psyche; like dreams, they image and narrate desires and anxieties; like dreams, they explore dramatization and explore imaginary positions. Thus, video games are devices in which players individually and collectively deposit psychic processes. These are transformative devices by which culture encrypts and decrypts the anxieties of the present time. They expose and explain the transformations we are experiencing and the anxieties they generate, whether they concern social bodies or individual bodies. Video games are one of the places where we can develop the social and individual anxieties that culture offers us."

Yann Leroux

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In a nutshell, some notes I took before an interview with Yann Leroux about the places in video games, an issue on which he is conducting a study.

– My relationship to exploration in videogames is identical to my relationship to walking in real life. I don't necessarily need exoticism or exceptional places to see; just the need to walk and feel conscious, attentive, open to the outside world. The pleasure of discovering an unknown street, seeing a familiar place from a different angle... Be attentive to my own emotions and thoughts that come with the places visited and their own atmosphere. I consider this as a form of meditation.

Gone home: the place is a narrative in itself. You also project your own anxieties, regardless of the story behind the game — which made me very uncomfortable almost like a horror game, even though that is not your first or only intention.

Syberia. Pathologic. Some buildings, some atmospheres remind me of real, dreamlike places, or places that exist in me on these two levels. The city of Nancy and my hometown, their dilapidated industrial zones, dilapidated... I have a complicated relationship to these places: nostalgia mixed with anxiety. But I need to go back there constantly.

– There is a pleasure of seeing a living world (inhabited places, which evolve or at least follow a rhythm) and living a "daily life" — jogging in Los Santos.

Second Life: move forward as if in an incoherent dream, from zone to zone, from atmosphere to atmosphere. Fantasies of voyeurism (entering people's homes). Real places adapted in SL (Saarbrucken).

This war of mine: paradox — places that are pleasant to me, where I want to spend time, to be able to act more, that make me feel good, whereas they are objectively places of suffering, of anxiety. The same paradox with Planescape Torment and its aesthetics of dirt, debris, corpses — these games and atmospheres resonate with recurring dreams in me, and "objectively" disturbing, whether they are frightening or not at the moment.

Fallout 1 & 2: some places are generated randomly, during the encounters on the map, and allow us to fantasize about an immense world even if we only see it in fragments. Isometric 3D also creates a distance, making the experience more "childish" (little men who move on a representation of space, seen from outside and above, as in a board game). Places are perceived and experienced differently depending on the type of graphics used.

– I do not necessarily expect, moreover, that the places of a game offer me an ultra-realistic space, but that they will offer me a space where I can act (places are useless if we can do nothing about it), and an understandable space, which has its identity (even Wasteland has this charm there) and therefore, its beauty.

Fallout NV: Powerful memory of my first trip without dying to New Vegas, bypassing the most dangerous areas and shooting my way through with a low-level character. Long after, fascinating rediscovery of the game, by the slowness — having fixed myself as constrained to always walk, never run. The ability to move very quickly removes the "weight" of places and distances, and promotes a purely utilitarian relationship to places. We no longer "see" them.

Daggerfall: intellectual, abstract fascination for the insane size of the map. The places themselves are of no interest (we have seen a city and a piece of countryside, and we have seen everything) but the pleasure they bring lies in the idea, not in the experience.

Quelques réflexions sur le poids des lieux dans les jeux vidéos

"Comme le rêve, le jeu vidéo met en scène des théâtres des psychés individuelles ; comme le rêve, il met en image et en narration des désirs et des angoisses ; comme le rêve, il explore dramatise et explore des positions imaginaires. [...] Ainsi, les jeux vidéo sont des dispositifs dans lesquels les joueurs déposent individuellement et collectivement des processus psychiques. Ce sont des dispositifs de transformation par lesquels la culture encrypte et décrypte les angoisses des temps présents. Ils exposent et expliquent les transformations que nous vivons et les angoisses qu’elles suscitent qu’elles concernent les corps sociaux ou les corps individuels. Les jeux vidéo sont un des lieux d’élaboration d’angoisses sociales et individuelles que nous offre la culture."

Yann Leroux

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En vrac, quelques notes que j'ai prises préalablement à un entretien avec Yann Leroux au sujet des lieux dans les jeux vidéos, question sur laquelle il mène une étude.

– Mon rapport à l'exploration dans les JV est identique à mon rapport à la promenade dans la vie réelle. Pas obligatoirement besoin d'exotisme ou de lieux exceptionnels à voir ; juste le besoin de marcher et de me sentir "au monde", conscient, attentif, ouvert à l'extérieur. Le plaisir de découvrir une rue inconnue, de voir un endroit familier sous un angle différent, etc. Être attentif à ses propres émotions et pensées qui viennent au fil des lieux visités et de leur ambiance propre. Je considère cela comme une forme de méditation.

Gone home : le lieu est une narration en soi. On y projette aussi ses propres angoisses, indépendamment de l'histoire portée par le jeu — qui m'a mis très mal à l'aise presque comme un jeu d'horreur, alors que ça n'est pas sa première ni unique intention.

Syberia. Pathologic. Certains bâtiments, certaines ambiances me rappellent des lieux réels, oniriques, ou qui existent en moi sur ces deux plans. Nancy et Sarreguemines, leur côté industriel, délabré, etc... Rapport compliqué à ces lieux : nostalgie mêlée d'angoisse. Mais besoin d'y retourner.

– Plaisir de voir un monde vivre (donc lieux mais lieux habités, qui évoluent ou au moins suivent un rythme) et d'y mener une "vie quotidienne" — jogging à Los Santos.

Second Life : avancer comme dans un rêve incohérent, de zone en zone, d'ambiance en ambiance. Fantasmes de voyeurisme (entrer chez les gens). Lieux réels adaptés dans SL (Saarbrucken).

This war of mine : paradoxe — des lieux qui me sont agréables, où j'ai envie de passer du temps, de pouvoir agir plus, qui me font me sentir bien, alors qu'ils sont objectivement des lieux de souffrance, d'angoisse. Même paradoxe avec Planescape Torment et son esthétique de la crasse, des débris, des cadavres — ces jeux et ces ambiances entrent en résonance avec des rêves récurrents chez moi, et dérangeants "objectivement", qu'ils soient angoissants ou non sur le moment.

Fallout 1 & 2 : les lieux générés de façon aléatoire, lors des rencontres sur la map, laissent fantasmer un monde immense même si on ne le voit que par fragments. La 3D isométrique installe aussi une distance avec le monde du jeu, rend l'expérience plus "enfantine" (petits bonhommes qui bougent sur une représentation de l'espace, vue du dehors et du dessus, comme dans un jeu de plateau). Les lieux sont perçus, vécus différemment selon le type de graphismes utilisés.

– Je n'attends pas nécessairement, d'ailleurs, des lieux d'un jeu qu'ils m'offrent un espace ultra réaliste, mais qu'ils m'offrent un espace où agir (les lieux ne servent à rien si on ne peut rien y faire), et un espace compréhensible, qui ait son identité (même Wasteland 1 a ce charme là) et donc, sa beauté, fut-elle à gros pixels (enfance de CPC-iste).

Fallout NV : souvenir puissant de mon premier trajet sans mourir jusqu'à New Vegas, en contournant les zones les plus dangereuses et en me frayant un chemin à coup de flingue avec un personnage de bas niveau. Longtemps après, redécouverte fascinée du jeu, par la lenteur — m'étant fixé comme contrainte de toujours marcher, ne jamais courir. La possibilité de se déplacer très vite évacue le "poids" des lieux et des distances, et favorise un rapport purement utilitaire aux lieux. On ne les "voit" plus.

Daggerfall : fascination intellectuelle, abstraite, pour la taille démentielle de la map. Les lieux en eux-mêmes ne présentent aucun intérêt (on a vu une ville et un bout de campagne, et on a tout vu) mais le plaisir qu'ils procurent réside dans l'idée, pas dans l'expérience.

mercredi 10 juin 2015

Circuit's Edge

Je joue, ces jours-ci, à un bon vieux jeu d'aventure, avec des morceaux de RPG dedans, appelé Circuit's Edge. Une enquête policière dans un setting arabo-cyberpunk – ce qui a le mérite d'être original, tout en ayant un petit côté burroughsien, époque Le Festin Nu, avec une omniprésence des drogues et du sexe – sous toutes ses orientations, et avec tous les "genres" concevables – carrément inhabituelle dans le monde du jeu vidéo, aujourd'hui comme à l'époque.



Le jeu est à interface textuelle, même si on n'entre pas de phrases comme dans un jeu à parser – il s'agit d'un menu déroulant, comme on peut en trouver dans Le Manoir de Mortevielle. Ce qui a le mérite de cadrer d'emblée l'action (pas de doutes sur ce qu'on peut / ne peut pas faire), même s'il subsiste des ambiguïtés – en lisant le walkthrough on se dit par moments, "tiens, je pouvais faire ça, de telle manière biscornue ?", et c'est dommage. Le jeu reste néanmoins plutôt aisé d'utilisation et intuitif.



Les graphismes sont minimalistes (une vue en FPS lorsqu'on se balade dans la rue, puis une image d'ambiance, agrémentée d'un portrait si on parle à un PNJ, lorsqu'on se trouve dans un lieu) mais ont une réelle identité, installent une ambiance et à vrai dire, me font angoisser face à ma propre absence totale d'images dans mes projets de jeu. J'ai toujours considéré que mes petits mondes imaginaires étaient trop difficiles à illustrer, mais au fond, qu'est-ce qui compte ? La fidélité à mes images mentales (que rien ne pourra m'enlever de toutes manières), ou donner au joueur quelque chose qui lui fasse voir, sentir, vivre, habiter le monde du jeu, quitte à être lacunaire ?



Chose rare encore dans un jeu textuel (mais en est-ce vraiment un, en réalité ?), le temps du jeu s'écoule... en temps réel. Il y a de quoi être surpris quand on laisse le jeu tourner en fond, pour surfer un peu sur le web, et que soudain, on entend son téléphone sonner, parce que tel PNJ veut qu'on lui livre telle marchandise louche...



Avec une bonne soixantaine de lieux à visiter (bars louches, commerces en tous genres et immeubles d'habitation, essentiellement, plus quelques lieux en dehors de la ville, comme des docks, ou un cimetière) le jeu donne vraiment l'impression, sans être immense, d'une vraie ville vivante à visiter, à apprivoiser – les PNJ ont leur emploi du temps, et dans les rues, les passants vont et viennent, et on peut les aborder. Les ruelles sont peuplées de loubards qui attaquent par surprise et de mendiants. Là aussi j'ai pris une leçon : pas besoin de créer 2000 lieux, pas besoin d'être bavard ou excessif, pour installer une ambiance et l'émerveillement du joueur devant un environnement à découvrir.



Quand à l'enquête en elle-même, à part certains passages auxquels je n'aurais jamais rien compris sans lire le walkthrough, elle est plutôt logique et intéressante. Pas de puzzles capillotractés ; on suit une piste, d'indice en indice, d'indic en indic – avec ce plaisir un peu archaïque de prendre des notes à la main, puisque le jeu n'a pas de journal de quête et autres gadgets modernes.

À noter que la forme de l'enquête héritée du roman policier est largement plus intéressante que celle de la quête au sens RPG du terme (la fameuse fetch-quest étant son archétype absolu, le plus navrant, et le plus courant), où l'on trouve rarement des rebondissements et où le joueur est rarement embarqué malgré lui dans des complications, des péripéties, et élargissement de l'histoire et des enjeux – ici, on va de surprise en surprise, de rebondissement et ennuis supplémentaires, et le jeu n'est pas une liste de courses où l'on ne fait que ce que l'on veut, sans conséquences.

mercredi 13 mai 2015

Dustbowl



C'est totalement par hasard que j'ai découvert sur Twitter l'existence de ce jeu, Dustbowl, qui semble être sur le point de sortir sur Steam. Un RPG avec un système de point and click, des graphismes qui semblent sortir des années 80 (et c'est un compliment), qui cite S.T.A.L.K.E.R et Fallout parmi ses influences, et qui enfin, compte un français parmi ses développeurs, ma foi, ça ne se voit pas tous les jours.





Aussi bien dans les ambiances que dans les PNJ et les quêtes proposées, on est en terrain connu, sans que cela n'ait rien de gênant – le tout est attachant et on a envie d'explorer, de progresser. La difficulté, à ce propos est plutôt corsée, les combats meurtriers et les medikits rares.



vendredi 27 mars 2015

La volatilité du fun

J'ai joué à quelques très mauvais jeux ces jours-ci, et je ne crois pas exagérer en disant que c'est une expérience profondément déprimante.

Je fondais de grands espoirs sur Might and Magic 6, alléché par le nombre d'heures de jeu promises, le nombre de quêtes, etc... Je me voyais déjà combattre et looter et leveller patiemment, après le travail, jour après jour... et en fait j'ai abandonné au bout de quelques heures, me rendant compte que taper, looter et progresser ne suffit pas (quelle découverte ! mais que cherchais-je réellement, alors ?) et que ce jeu n'est rien d'autre qu'un jeu de baston déguisé en RPG - il n'y absolument pas de dialogues, et donc aucune notion de "roleplay ", rien qui ressemble un tant soit peu à de la vie quotidienne, pas d'objets à manipuler pour agir sur le monde, rien, rien d'autre que taper sur des centaines, des milliers, des millions d'ennemis pour progresser de zone en zone. Mais à quoi bon ?

Ce jeu est sorti en 1998, soit six ans après Ultima 7, dont je ne rappellerai pas ici en détail à quel point il propose un univers complet, vivant, incroyablement attachant.

Bref : désinstallation.

Mais peut-être les graphismes sont-ils aussi en cause ? On pardonne beaucoup de choses aux élèves mignons, c'est un fait reconnu, et il en va de même pour les jeux. Au moins, dans un jeu beau, on peut toujours se promener, jouir des décors, du simple fait d'être là. Je dois avouer que c'est ce que je ressens face à Skyrim : je me balade et découvre peu à peu les lieux, qui sont parfois très beaux. Et à aucun moment, jusqu'ici, je n'ai ressenti l'envie de me jeter dans la quête principale, ni dans quelque quête que ce soit, d'ailleurs - et même pas de me battre ou de looter pour faire progresser mon personnage. C'est étonnant, c'est absence d'incitation à jouer – alors que je suis un fanatique de Morrowind, qui, je crois, prend encore moins le joueur par la main.

Et ceci même alors que contrairement aux jeux cités plus hauts, Skyrim propose un peu plus de roleplay et de vie quotidienne, de manipulation d'objets, de métiers, de relations avec les PNJ, etc.

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Contre-exemple absolu : j'ai passé plusieurs heures hier soir à m'éclater sur Caves of Qud, un roguelike post-apocalyptique. S'il y a un scenario je n'ai pas eu le temps de le découvrir, vu que c'est le genre de jeu où l'espérance de vie est de 15 minutes, quand on a de la chance – mais explorer la map, combattre et progresser peu à peu, ramasser de la nourriture, des objets, survivre, tout simplement, se sont avérés une motivation suffisante. Et je pense que je vais le poursuivre, apprendre patiemment à y faire mon trou.

Alors au final, qu'est-ce qui rend un jeu fun, ou pas ? Qu'est-ce qui fait qu'on a envie d'y passer des heures ? De suivre les missions, d'aller au bout, de surmonter les difficultés, bref, de jouer le jeu ?

Et qu'est-ce qu'un beau jeu ? Je trouve MM6 hideux et Wasteland 1 superbe (et Wasteland 2 très laid), mais y-a-t-il quoi que ce soit de rationnel, de "théorisable" là-dedans ?

Ce sont des questions auxquelles je n'ai absolument pas de réponse mais qu'il faudrait que je me pose sérieusement si je veux en créer moi-même, des jeux...

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Dans ma quête déprimée de bons jeux, j'ai craqué pour Age of Decadence – 20 euros, quand même. La démo m'avait laissé un souvenir amer et circonspect, l'argument "ouais mais c'est un RPG hardcore " ne m'ayant jamais paru excuser une difficulté réglée beaucoup trop haut, du moins si l'on prend en compte le fait qu'il n'existe aucune notion de hasard dans le jeu, ni aucun moyen de progresser petit à petit avec des quêtes récurrentes ou aléatoires – en gros, donc, si l'on a pas calculé la meilleure build possible pour son personnage, on ne réussira aucune quête et on aura aucune chance de progresser petit à petit. Et je ne joue pas à un RPG pour trouver je ne sais quelle équation parfaite.

Le jeu est sympathique, ceci étant, j'aime assez les graphismes, le lore est manifestement très soigné et développé, original, c'est le genre de jeu que l'on aimerait aimer – mais il faut une dose de masochisme que je n'ai pas. Il est bien entendu possible aussi que je sois nul, et c'est même sûrement le cas. Mais même un RPG hardcore devrait être hardcore d'une autre manière que mathématique...

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Une chose que j'ai trouvée intéressante, ceci dit – mais dans mon optique de développeur : il n'y a pas de continuité spatio-temporelle absolue dans le jeu, qui s'évite ainsi beaucoup de travail probablement inutile ; on choisit telle option de dialogue, et hop, on se retrouve dans un autre lieu, entouré d'ennemis, ou chez un PNJ à qui parler. Sans être obligé réellement de faire tout le chemin – c'est à dire sans obliger les développeurs à concevoir tout un espace continu entre les lieux. Et au fond, ce sont les situations qui sont intéressantes – pas chaque seconde, ou chaque mètre parcouru qui y mènent.

Ce qui viole un peu le quasi-dogme qu'est devenu l'open world, j'en ai conscience - du moins si l'on considère qu'open world signifie nécessairement map entièrement ouverte et sans discontinuité.

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Dans la foulée je me suis remis à Anachronox, auquel j'avais joué dix minutes il y a quelques années, et j'ai été conquis : pur fun, zéro réflexion ou presque – au sens où il n'y a pas de puzzles énervants ni de séquence où il faut deviner ce que l'on doit faire – et on ne BLOQUE pas le joueur quand il échoue dans une séquence d'action ; on lui propose de passer outre, et les fous du joysticks, eux, peuvent recommencer. Et tout ça, c'est exactement ce qu'il faut faire. Le manque de liberté, d'embranchements multiples, de roleplay pur, etc, ne se fait pas sentir parce que l'histoire est chouette, les dialogues hilarants et très bien écrits, les persos attachants et le monde agréable à explorer, chapitre après chapitre.

Quelques idées concernant les combats

Tout ceci m'amène à lister quelques principes qui me semblent valables quel que soit le type de jeu, mais évidemment, ils rajoutent  de la complexité ; je ne me fais donc pas d'illusion, il est très improbable de voir un jour un jeu vidéo ou une fiction interactive s'y conformer :

• Pas de game-over : la mort doit être exceptionnelle – elle est trop souvent infligée par facilité ou manque d'imagination. Au lieu de mourir après chaque combat perdu, le personnage-joueur peut tout aussi bien être capturé et devoir s'évader ou attendre d'être libéré – ou bien passer plusieurs semaines sur un lit d'hôpital, sans aucune prise sur le monde et ce qui s'y passe. Une quête échouée ne devrait pas non plus donner envie envie au joueur de recharger sa dernière sauvegarde : l'histoire devrait continuer AUSSI riche que si la quête avait réussi ; mais différemment, c'est tout.

• Les combats doivent exploiter toutes les positions physiques possibles (debout, au sol, caché, etc) et tous les objets ou éléments de décor : pousser un type dans la mer, pousser quelqu'un dans les escaliers ou par la fenêtre, assommer son ennemi puis l'abandonner (dans un lieu mortel en soi, comme le désert)

• Ils doivent être dynamiques, réalistes ; sûrement pas deux personnages immobiles ou presque, debout l'un devant l'autre, qui se frappent jusqu'à ce que l'un des deux meurent.

• Il doit être possible de dialoguer pendant les combats, pour demander grâce, négocier, menacer. D'éviter un combat en négociant, quitte à même se rendre.

• Le combat ne devrait être ni incessant au cours du jeu, ni le moyen principal par lequel le joueur expérimente la difficulté du jeu, et la progression de son personnage.

vendredi 30 janvier 2015

Pathologic

I started a new game of Pathologic, without any cheat this time – since my first game was in cheat mode from the beginning to the end, which allowed me to discover the history of the game and the evolution of the events day after day, and my expectations of a "living world" were not disappointed.

Without any cheat, which redefines heavily the way of playing and the priorities you have in the game; in this case, the quests will take a back seat, the goal being to SURVIVE, which is not an easy task. Few games are as punishing as Pathologic, where battles are settled – usually to your disadvantage – in three or four moves, and wounds don't magically heal after eating a slice of bread or sleeping for a few hours.

This being said, it's not its gameplay, nor even its story, that made me like this game and that I'm playing it again from the beginning, a few months after my first game. I realize, when I play it again, that wandering from morning to night, as well as at night, rummaging through the garbage, is enough for me; wandering through the small streets, along the walls of the cemetery, attracted by the pale light of the street lamps, in the middle of the dead leaves carried by the wind.

The settings are poor and repetitive, the scripts too (leaves in the wind, passers-by walking or staggering), the colors are dull, earthy; and it is precisely that which gives its charm, its fascination to the game, to the world it proposes; which gives it an identity. The world that one travels through is repetitive and insistent like a nightmare; wherever one goes, everything is the same, everything seems to run in slow motion, there is no one to talk to – the inhabitants of the city seem from the beginning to be lost in their own dreams – nothing seems to be able to ever really change; whatever events take place over the course of the days and justify the quests. We are in the "world of the grave" – whether this is a will of the developers, or the consequence of a lack of means...

I don't know how long I'll "enjoy" playing like this, with no goals, no discoveries, no new real events ever taking place and nothing really possible - but what is certain is that Pathologic has a poisonous, insidious charm; it's the kind of game, like Vampire: Bloodlines, that you keep coming back to, knowing that you'll feel bad about it and that it won't have anything to offer but sordid musings. Maybe it should have been called Neurotic?

Pathologic



J'ai recommencé une partie de Pathologic, sans aucun cheat cette fois – puisque ma première partie a été en mode triche du début à la fin, ce qui m'a permis de découvrir l'histoire du jeu et l'évolution des événements jour après jour, et dans le genre "monde vivant" je n'ai pas été déçu.

Sans aucun cheat, donc, ce qui redéfinit donc lourdement la façon de jouer et les priorités qu'on a dans le jeu ; en l’occurrence, les quêtes passeront au second plan, le but étant de SURVIVRE, ce qui n'est pas une mince affaire. Peu de jeux sont aussi punitifs que Pathologic, où les combats sont réglés – généralement en votre défaveur – en trois ou quatre coups, et où les blessures ne guérissent pas par magie après avoir mangé une tranche de pain ou dormi quelques heures.



Ceci étant, ça n'est pas son gameplay, ni même son histoire, qui font que j'ai aimé ce jeu et que je le reprends du début, quelques mois après ma première partie. Je me rends compte, en y rejouant, qu'errer du matin au soir, ainsi que la nuit, à fouiller les poubelles, me suffit largement ; errer et sillonner les petites rues, longer les murs du cimetière, attiré par la lumière blafarde des lampadaires, au milieu des feuilles mortes emportées par le vent.

Les décors sont pauvres et répétitifs, les scripts aussi (feuilles dans le vent, passants qui marchent ou titubent), les couleurs ternes, terreuses ; et c'est précisément ça qui donne son charme, sa fascination au jeu, au monde qu'il propose ; qui lui donne une identité. Le monde qu'on parcourt est répétitif et insistant comme un cauchemar ; où qu'on aille, tout est pareil, tout semble marcher au ralenti, il n'y a personne à qui parler – les habitants de la ville semblent dès le début perdus eux-mêmes dans leurs rêves – rien semble ne pouvoir jamais changer réellement ; quels que soient les événements qui ont lieu au fil des jours et qui justifient les quêtes. On est dans le "monde de la tombe" – que ce soit une volonté des développeurs, ou la conséquence d'un manque de moyens...



Je ne sais pas combien de temps cela "m'amusera" de jouer comme ça, sans but, sans découvertes, sans qu'aucun nouveau vrai événement n'ait jamais lieu ni que rien ne soit réellement possible – mais ce qui est sûr c'est que Pathologic a un charme vénéneux, insidieux ; c'est le genre de jeu, comme Vampire : Bloodlines, auquel on revient toujours, en sachant qu'on s'y sentira mal et qu'il n'aura rien à d'autre à proposer que des rêveries sordides. Peut-être aurait-il dû s'appeler Neurotic ?