mercredi 8 juin 2011

Un jeu vidéo comme un autre

Un ami qui me disait il y a un an ou deux, en parlant de la misère absolue du musicien de home studio, seul devant son PC avec ses synthés virtuels, et pour qui "exister" se limiterait souvent à avoir un compte MySpace ou SoundCloud :

"Faire de la musique est devenu un jeu vidéo comme un autre".

C'est vrai, nous passons nos vies devant nos PC, dans la solitude, et dans un processus de composition d'une froideur effrayante. Où sont les répètes d'antan ?

Ceci étant, avec la démocratisation des ordinateurs, des logiciels de MAO, de la diffusion de sa musique, etc, la figure de l'Artiste, avec un grand A, disparaît peu à peu – si tout le monde est artiste, alors (à part quelques vrais très grands incontestables) personne ne l'est. Mais alors que sommes-nous ?

Peut-être qu'effectivement, composer, aujourd'hui, n'est pas très différent d'une balade dans Second Life – il s'agit de s'évader (pour dire vite) et de vivre une expérience (unique) à travers un outil (que tout le monde possède), et d'en garder une trace – screenshot ou enregistrement sonore, qu'importe ?

Et pourquoi pas un synthé dans l'appartement du héros du prochain GTA, permettant de jouer réellement, et de s'enregistrer ?

Pourquoi pas un jeu où l'on incarnerait un peintre (on est bien écrivain dans Alan Wake), qui, entre deux aventures, entre deux étapes du scénario, pourrait réellement produire des toiles dans, avec une sorte d'Illustrator intégré ?

Ici la métafiction ne consisterait pas à inventer des fan-stories se déroulant dans un monde fictif donné ; c'est la nouvelle œuvre qui prendrait place dans la fiction première même. Et qui bénéficierait de tout ce contexte entourant sa création.

Au lieu d'être de faux artistes et vrais geeks solitaires devant nos machines, essayant désespérément de faire connaître notre production, et par là, usurpant un statut d'artiste qui n'a plus de sens, peut-être devrions assumer de disparaître entièrement, de simplement prendre place dans de multiples fictions, d'en devenir nous-mêmes, de l'assumer et d'en tirer profit.