lundi 24 novembre 2014

Dialogues – Choix limités ou pseudo ChatBot ?

Un ami me demandait, juste après lecture de l'un de mes articles, pourquoi je ne créais pas un système de dialogue où le joueur puisse taper tout ce qui lui passe par la tête, librement – après quoi le jeu reconnaîtrait certains mots-clés, du type :

- Bonjour je suis perdue.
- Cherchez-vous un endroit où dormir ?
- Oui.
- * liste d'endroits où dormir *
- Le maire est corrompu.
- Pour moi la ville se porte comme un charme grâce au maire et à ses administrés.

Naturellement, l'idée de pouvoir écrire ce qu'on veut et obtenir des réponses, comme on parlerait à un ChatBot, est séduisante. Mais c'est un écueil, pour plusieurs raisons.

La première est que cela serait très long et compliqué à programmer, et presque même impossible, tant il y aurait d’ambiguïtés à gérer : admettons que le joueur soit perdu, alors qu'il est en route pour retrouver une petite fille perdue, un soir de match où l'équipe locale a perdu ; faire en sorte que le programme comprenne de quoi parle le joueur quand il utilise cet adjectif (je raisonne en Inform7, ne connaissant aucun autre langage) serait un cauchemar absolu.

D'autre part, je sais d'expérience que les joueurs haïssent la liberté, ou plutôt le sentiment d'être paumé et désœuvré, face à une liberté perçue comme trop grande – rien que de pouvoir choisir eux-même quels verbes utiliser pour agir, dans un jeu à parser, les déstabilise complètement. "Je ne sais pas quoi faire" : voilà le commentaire le plus souvent lu et entendu. Au lieu de se dire qu'il peut tout faire, le joueur a l'impression qu'il ne peut rien faire ; probablement les gens habitués aux IF ne se rendent-ils plus compte de ce que vit le joueur lambda dans cette situation.

Aussi, il est vraiment préférable, ne serait-ce que pour les dialogues, de suggérer au joueur une liste de répliques possibles ; cela le rassure, puisque ça cadre et délimite l'action, et lui donne des idées auxquelles il n'aurait pas pensé par lui-même, ou lui rappelle des éléments de l'intrigue qu'il avait oubliés (mais dont son personnage, lui, est naturellement sensé se souvenir).

Il y a aussi un côté fun , purement ludique, dans le fait d'exploiter méthodiquement tous les sujets de discussion proposés, comme on fouille méthodiquement une pièce à la recherche d'objets ou d'info.

La valeur ajoutée étant quand de nouveaux sujets apparaissent sans cesse, et que le joueur est bluffé – et non plus perdu et effrayé – devant l'immensité des possibilités...

mardi 2 septembre 2014

Nouvelles en vrac

J'ai profité de mes vacances pour taper sur PC mes anciens journaux intimes – d'atroces, verbeuses et ridicules tartines d'adolescent – en résumant, synthétisant les choses, et me suis rendu compte ou me suis souvenu que parfois, trois lignes peuvent être plus évocatrices, plus poétiques qu'un long pavé ; ce qui trouve pour moi une application directe dans la fiction interactive.

Ne serait-il pas agréable pour le joueur (et à vrai dire, un jeu comme Darklands fait déjà ça d'une certaine manière) de lire, avec un effort et une interactivité minimale mais suffisante, une multitude de petites aventures, de petits récits racontant ce qui lui arrive, au lieu (ou en plus) de longues quêtes ou de longs épisodes ?

Une fiction interactive raconte une histoire, et une histoire est une multitude de petites séquences qui font sens – sans aucune nécessité d'un découpage verbe-après-verbe qui  dilate le temps et l'action à l'infini (imaginons par exemple la quantité de verbes + complément qu'il faudrait taper au joueur pour préparer un repas, accueillir des amis, discuter avec eux, sortir faire un tour, essuyer une embuscade tendue par des membre d'une faction ennemie, etc – alors qu'un simple récit avec quelques choix type LDVELH permettant illusoirement ou non au joueur d'infléchir sur les événements, serait bien plus reposant et fun). Et cela permet à moindres coûts de multiplier le nombre de petites séquences dans un jeu.

*

J'ai passé pas mal de temps à jouer aussi, ce qui est toujours très inspirant pour mon propre projet – comme exemple ou comme contre-exemple...

Fallout 3 est très beau visuellement – pour mes yeux non-blasés de gamer n'ayant que récemment accédé à du matos moderne – mais la difficulté du jeu est parfaitement artificielle et malhonnête : le simple fait qu'on ne puisse pas dormir où l'on veut, et PIRE, que l'on ne puisse pas dormir dans un lit au fin fond d'une ruine abandonnée depuis deux cent ans, parce qu'il n'est pas owned par le joueur (qui n'avait qu'à se trouver une auberge ou un lit amical), ça m'a convaincu de jouer toute ma partie en godmode. Ce qui ne retire rien à l'ambiance, au contraire : on a l'esprit tranquille pour en profiter. New Vegas avait quand même bien rattrapé le coup, signalons-le.

À l'inverse, Gothic 3, que j'ai découvert il y a peu, et sur lequel je pense que je vais passer encore quelques dizaines d'heures, est difficile, voire vachard, mais suffisamment honnête et assez constamment gratifiant pour que l'on éprouve aucun besoin, ni aucune envie, de cheater. La progression est lente mais continue, et monter peu à peu en puissance est un vrai plaisir.

Il y aurait beaucoup d'autres choses à dire sur ce jeu : l'impeccable complexité des quêtes entremêlées, où il est toujours possible de changer de camp en dernière minute, de tromper tout le monde ou de rattraper une erreur, où rien n'est obligatoire ni définitivement pénalisant,  et où – chose tristement exceptionnelle dans un RPG alors que cela devrait être la base de la base – les actes du joueur ont un effet réel et conséquent sur le monde. Je ne connais pas d'autre RPG où il est possible de libérer un pays, ville après ville, d'une occupation, ou à l'inverse, d'être un collabo qui liquidera la résistance. Et qui selon ses actes sera admiré ou pourchassé selon là où il se rend. Vous avez déjà eu l'impression que quiconque en avait quelque chose à fiche de vos hauts faits, dans un Elder Scrolls ?

Je passe sur le fait que contrairement aussi à ce qu'on peut voir dans un Elder Scrolls, votre personnage souffre de la chaleur et du froid, et qu'un terrain très en pente l'essouffle assez vite... et qu'arriver vivant d'une ville à une autre est, au début du jeu, un putain de challenge. Ma découverte inattendue de Geldern, en pleine nuit, sous la pluie, courant comme un dératé parce que poursuivi par des gobelins, restera pour moi un très grand moment d'émotion – oui, d'émotion – vidéoludique. Je n'ai pas souvenir d'une expérience pareille dans (le néanmoins sympathique) Oblivion.

NEO Scavenger a manifestement le choix de la difficulté extrême et c'est la raison pour laquelle je ne pense pas insister beaucoup – disons que je réessaierai de temps en temps, mais les jeux impitoyables ont sur moi un effet décourageant, démotivant. Néanmoins, une trouvaille magnifique ici : les combats qui, contrairement à l'immense majorité des jeux, ne reposent pas grosso modo sur l'alternance attaque/parade, mais incluent la couverture, la fuite (on ne peut PAS fuir dans un Avernum, par exemple, et bien que j'adore cette série, c'est totalement consternant), l'attaque bersek ou prudente, ramper au sol si l'on est tombé, ou bien en profiter pour faucher les jambes de son adversaire – et même le menacer ou appeler à l'apaisement. Bref une vision plus narrative que mathématique des combats, dont je compte m'inspirer sans vergogne.

dimanche 11 mai 2014

Adventure Creation Kit

En faisant des recherches Google au sujet d'Adventure Creation Kit et de "comment créer des macros" (en gros, comment utiliser des variables) j'ai découvert le blog d'un français répondant au doux pseudonyme de Blue, qui a entamé un jeu "à la Wasteland" avec ce soft. Comme il le dit lui-même :

"WasteFrance c'est le nom temporaire de ce que j'essaye de créer via ACK, ça vient de Wasteland un jeu de rôle post-apocalyptique créé en 1988, je réutilise une partie de ses graphismes, et l'action se passe en France donc je vous fais pas un dessin."


Avec quelques screenshots sympa...



... et des extraits de son code, à but pédagogique, ce qui m'arrange bien... si ce n'est que le blog est inactif depuis 2010.

Si quelqu'un connaît ce monsieur, ou s'il tombe par hasard sur ces lignes : ce projet m'intéresse énormément, et en tant que créateur, et en tant que fanatique de Wasteland.

vendredi 9 mai 2014

Adventure Creation Kit


Merci à l'ami Eric qui m'a fait découvrir hier ce fabuleux soft, Adventure Creation Kit, qui est LE logiciel que je cherchais depuis des années : l'outil parfait pour créer son Ultima-like, avec des kits de tiles à utiliser d'office, sachant qu'on peut également importer ses propres graphismes (idem pour les sons). Créer une map, y insérer des PNJ amis ou hostiles, leur attribuer des dialogues (basés sur le système de topics, comme dans un Ultima ou un Magic Candle). On peut bien entendu ajouter du code à tout cela (dans un style proche du Basic). Je crois que je n'ai pas fini d'en parler...

Note du 19 mars 2018 :

En fait, si, j'avais fini d'en parler. Je n'ai jamais rien compris au langage de programmation d'ACK.

mercredi 16 avril 2014

Charme vieillot



Un dessin vaut mieux qu'un long discours, et une phrase bien tournée, aussi.

Je redécouvre une chose, en jouant à de vieux, très vieux, très très vieux jeux : c'est le charme spécifique et même la poésie, le mystère – involontaires à l'époque, mais réels – générés par les limitations techniques ; donc par les limitations tout court, de tout ordre.

Comme je l'ai déjà dit ici ou ailleurs je ne sais plus, un jeu comme Magic Candle reproduit involontairement et sans doute inconsciemment (c'est un jeu japonais sauf erreur de ma part) l'esthétique des tapisseries médiévales – et quoi de plus adapté pour un jeu qui précisément se déroule dans un monde moyenâgeux ? C'est ce que reproduit plus ou moins consciemment, je pense, l'un des développeurs les plus en vue dans le domaine du roguelike, avec le jeu Ultima Ratio Regum, dont la map très dézoomée ressemble à s'y méprendre à une tapisserie elle aussi.

Et si limités qu'ils soient, ces graphismes me parlent bien plus que ceux d'un Skyrim ou d'un The Witcher – précisément parce qu'ils sont limités, ils laissent la place à l'imagination, à la projection, et au manque ; cette frustration délicieuse de ne voir à l'écran qu'une partie du monde du jeu, qui excite l'imagination, au lieu d'une vision exhaustive et ultra-exacte comme dans un Elder Scrolls où l'on pourra bientôt arracher les poils des animaux pour les collectionner, ou que sais-je.





L'aspect pauvre et répétitif des graphismes est une meilleure option pour donner une identité forte et une ambiance à un jeu, qu'une "richesse" mal maîtrisée.

Quelques notes prises ces jours-ci, sur des questions proches :

Des PNJ vivants qui se déplacent, c'est bien et c'est impressionnant mais c'est insupportable quand on a besoin de trouver tel PNJ et qu'il faut explorer toute la map pour le trouver. Et les PNJ qui se déplacent continuellement, sont vivants, réalistes et avec lesquels on peut avoir des dialogues infinis, c'est très bien, mais les PNJ des vieux RPG, immobiles et qui délivrent deux ou trois répliques cryptiques qui n'ont aucun autre but que de donner au joueur des pièces du puzzle géant qu'est le jeu, ça a aussi un charme certain – un charme qui naît précisément du plaisir de reconstituer un puzzle en dehors de tout réalisme.

L'idéal est sans doute de mélanger les deux aspects : des PNJ immobiles et d'autres "vivants". Des PNJ aux dialogues limitées et puzzlesques, utilitaires, ou simplement poétiques, et d'autres avec qui avoir de vrais dialogues et nouer une relation qui évolue au cours de la partie.

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Un ami et collègue a déniché ceci :


Moi qui parlais il y a quelques temps de mon envie de me relancer dans le Basic 1.1, j'ai maintenant tout ce qu'il faut...