Il y a une chose qui me plaît particulièrement dans Firewatch, auquel j'ai rejoué récemment, et que j'ai eu envie de retrouver après avoir rejoué aussi à Dishonored : les manuscrits et les imprimés, disséminés un peu partout.
L'omniprésence du papier et de l'écrit.
Les bouquins. Les classeurs. Les lettres et notes personnelles.
La présence visible, matérielle, primaire, de l'information.
Quoi de plus beau qu'une carte annotée et augmentée au fil des années et des contributeurs ?
Quoi de plus excitant qu'un classeur rempli d'informations secrètes sur des choses ou des personnes, comme si la vie était un film d'espionnage ?
Quoi de plus cool qu'un bureau chargé en notes, en schémas, en lettres manuscrites ou tapées à la machine, où l'on a, sans médiation, sans besoin d'aucune machine, sa pensée sous les yeux ?
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J'ai eu ma période "carnets Moleskine" il y a 15 ans, période à laquelle j'ai retrouvé le plaisir de griffonner, de dessiner, de prendre des notes au fil de la pensée... Beaucoup de mes notes concernant mes fictions interactives, ma musique, mes textes littéraires ou mes décisions en matière de vie personnelle s'y trouvent.
Il n'empêche que nous avons, pour de bon, et pour le meilleur comme pour le pire, depuis le début des années 2000, basculé dans le monde des e-mails, de Google docs, d'Evernote, etc.
J'adorerais échanger des lettres, des notes, des croquis, des documents annotés, avec quelques amis, au sujet de n'importe quoi, peu importe, juste pour le plaisir de revenir un peu à l'écrit, à cette chose qui presque autant que le langage articulé définit l'humain : le fait de tracer des signes à la main, compréhensibles par d'autres.
Néanmoins je dois me rendre à l'évidence ; tout cela est mort. Il y a quelques semaines j'ai justement entamé une lettre, sur papier, à l'attention d'un ami, qui gère un label musical, avec qui je discute régulièrement sur Messenger et Telegram, et qui partage – c'est générationnel – ma nostalgie du bon vieux temps des lettres et des flyers, des catalogues, du papier en général. Et je me suis retrouvé, après deux pages à disserter sur le sens du fait même de s'envoyer des courriers, plongé dans une déprime invraisemblable dont je ne me suis débarassé qu'en déchirant tout ça et en me résolvant à continuer à lui écrire des mails ou des DM.
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En revanche il m'est possible de vivre ces fantasmes de papier dans ma vie artistique privée, pour appeler ça comme ça ; j'ai quelques classeurs chez moi, déjà, ou je garde de vieilles notes, des dessins, des mémos, des adresses griffonées, des photocopies de ceci ou cela – que cela concerne ma vie musicale, l'I.F ou n'importe quoi d'autre.
De la même manière, je possède un Filofax où je consigne les messes que je paie pour tel ou tel défunt, telle ou telle intention, et où j'ai un listing aussi exaustif que possible de toutes les personnes ou groupes de personnes que j'ai approchés dans ma vie, susceptibles de faire l'objet d'intentions de messe, de prière, ou de jeûne en leur faveur. J'aime voir une feuille de classeur comportant des noms, des dates, de petites cases à cocher. Indéniablement il y a quelque chose d'un bureaucrate en moi. Autant mettre cet aspect de ma personnalité au service de ma vie spirituelle et artistique. Car la vie est à la fois un jeu et un combat du plus grand sérieux, qui nécessite méthode et documentation.
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