J'ai profité de mes vacances pour taper sur PC mes anciens journaux intimes – d'atroces, verbeuses et ridicules tartines d'adolescent – en résumant, synthétisant les choses, et me suis rendu compte ou me suis souvenu que parfois, trois lignes peuvent être plus évocatrices, plus poétiques qu'un long pavé ; ce qui trouve pour moi une application directe dans la fiction interactive.
Ne serait-il pas agréable pour le joueur (et à vrai dire, un jeu comme Darklands fait déjà ça d'une certaine manière) de lire, avec un effort et une interactivité minimale mais suffisante, une multitude de petites aventures, de petits récits racontant ce qui lui arrive, au lieu (ou en plus) de longues quêtes ou de longs épisodes ?
Une fiction interactive raconte une histoire, et une histoire est une multitude de petites séquences qui font sens – sans aucune nécessité d'un découpage verbe-après-verbe qui dilate le temps et l'action à l'infini (imaginons par exemple la quantité de verbes + complément qu'il faudrait taper au joueur pour préparer un repas, accueillir des amis, discuter avec eux, sortir faire un tour, essuyer une embuscade tendue par des membre d'une faction ennemie, etc – alors qu'un simple récit avec quelques choix type LDVELH permettant illusoirement ou non au joueur d'infléchir sur les événements, serait bien plus reposant et fun). Et cela permet à moindres coûts de multiplier le nombre de petites séquences dans un jeu.
J'ai passé pas mal de temps à jouer aussi, ce qui est toujours très inspirant pour mon propre projet – comme exemple ou comme contre-exemple...
Fallout 3 est très beau visuellement – pour mes yeux non-blasés de gamer n'ayant que récemment accédé à du matos moderne – mais la difficulté du jeu est parfaitement artificielle et malhonnête : le simple fait qu'on ne puisse pas dormir où l'on veut, et PIRE, que l'on ne puisse pas dormir dans un lit au fin fond d'une ruine abandonnée depuis deux cent ans, parce qu'il n'est pas owned par le joueur (qui n'avait qu'à se trouver une auberge ou un lit amical), ça m'a convaincu de jouer toute ma partie en godmode. Ce qui ne retire rien à l'ambiance, au contraire : on a l'esprit tranquille pour en profiter. New Vegas avait quand même bien rattrapé le coup, signalons-le.
À l'inverse, Gothic 3, que j'ai découvert il y a peu, et sur lequel je pense que je vais passer encore quelques dizaines d'heures, est difficile, voire vachard, mais suffisamment honnête et assez constamment gratifiant pour que l'on éprouve aucun besoin, ni aucune envie, de cheater. La progression est lente mais continue, et monter peu à peu en puissance est un vrai plaisir.
Il y aurait beaucoup d'autres choses à dire sur ce jeu : l'impeccable complexité des quêtes entremêlées, où il est toujours possible de changer de camp en dernière minute, de tromper tout le monde ou de rattraper une erreur, où rien n'est obligatoire ni définitivement pénalisant, et où – chose tristement exceptionnelle dans un RPG alors que cela devrait être la base de la base – les actes du joueur ont un effet réel et conséquent sur le monde. Je ne connais pas d'autre RPG où il est possible de libérer un pays, ville après ville, d'une occupation, ou à l'inverse, d'être un collabo qui liquidera la résistance. Et qui selon ses actes sera admiré ou pourchassé selon là où il se rend. Vous avez déjà eu l'impression que quiconque en avait quelque chose à fiche de vos hauts faits, dans un Elder Scrolls ?
Je passe sur le fait que contrairement aussi à ce qu'on peut voir dans un Elder Scrolls, votre personnage souffre de la chaleur et du froid, et qu'un terrain très en pente l'essouffle assez vite... et qu'arriver vivant d'une ville à une autre est, au début du jeu, un putain de challenge. Ma découverte inattendue de Geldern, en pleine nuit, sous la pluie, courant comme un dératé parce que poursuivi par des gobelins, restera pour moi un très grand moment d'émotion – oui, d'émotion – vidéoludique. Je n'ai pas souvenir d'une expérience pareille dans (le néanmoins sympathique) Oblivion.
NEO Scavenger a manifestement le choix de la difficulté extrême et c'est la raison pour laquelle je ne pense pas insister beaucoup – disons que je réessaierai de temps en temps, mais les jeux impitoyables ont sur moi un effet décourageant, démotivant. Néanmoins, une trouvaille magnifique ici : les combats qui, contrairement à l'immense majorité des jeux, ne reposent pas grosso modo sur l'alternance attaque/parade, mais incluent la couverture, la fuite (on ne peut PAS fuir dans un Avernum, par exemple, et bien que j'adore cette série, c'est totalement consternant), l'attaque bersek ou prudente, ramper au sol si l'on est tombé, ou bien en profiter pour faucher les jambes de son adversaire – et même le menacer ou appeler à l'apaisement. Bref une vision plus narrative que mathématique des combats, dont je compte m'inspirer sans vergogne.
Ne serait-il pas agréable pour le joueur (et à vrai dire, un jeu comme Darklands fait déjà ça d'une certaine manière) de lire, avec un effort et une interactivité minimale mais suffisante, une multitude de petites aventures, de petits récits racontant ce qui lui arrive, au lieu (ou en plus) de longues quêtes ou de longs épisodes ?
Une fiction interactive raconte une histoire, et une histoire est une multitude de petites séquences qui font sens – sans aucune nécessité d'un découpage verbe-après-verbe qui dilate le temps et l'action à l'infini (imaginons par exemple la quantité de verbes + complément qu'il faudrait taper au joueur pour préparer un repas, accueillir des amis, discuter avec eux, sortir faire un tour, essuyer une embuscade tendue par des membre d'une faction ennemie, etc – alors qu'un simple récit avec quelques choix type LDVELH permettant illusoirement ou non au joueur d'infléchir sur les événements, serait bien plus reposant et fun). Et cela permet à moindres coûts de multiplier le nombre de petites séquences dans un jeu.
*
J'ai passé pas mal de temps à jouer aussi, ce qui est toujours très inspirant pour mon propre projet – comme exemple ou comme contre-exemple...
Fallout 3 est très beau visuellement – pour mes yeux non-blasés de gamer n'ayant que récemment accédé à du matos moderne – mais la difficulté du jeu est parfaitement artificielle et malhonnête : le simple fait qu'on ne puisse pas dormir où l'on veut, et PIRE, que l'on ne puisse pas dormir dans un lit au fin fond d'une ruine abandonnée depuis deux cent ans, parce qu'il n'est pas owned par le joueur (qui n'avait qu'à se trouver une auberge ou un lit amical), ça m'a convaincu de jouer toute ma partie en godmode. Ce qui ne retire rien à l'ambiance, au contraire : on a l'esprit tranquille pour en profiter. New Vegas avait quand même bien rattrapé le coup, signalons-le.
À l'inverse, Gothic 3, que j'ai découvert il y a peu, et sur lequel je pense que je vais passer encore quelques dizaines d'heures, est difficile, voire vachard, mais suffisamment honnête et assez constamment gratifiant pour que l'on éprouve aucun besoin, ni aucune envie, de cheater. La progression est lente mais continue, et monter peu à peu en puissance est un vrai plaisir.
Il y aurait beaucoup d'autres choses à dire sur ce jeu : l'impeccable complexité des quêtes entremêlées, où il est toujours possible de changer de camp en dernière minute, de tromper tout le monde ou de rattraper une erreur, où rien n'est obligatoire ni définitivement pénalisant, et où – chose tristement exceptionnelle dans un RPG alors que cela devrait être la base de la base – les actes du joueur ont un effet réel et conséquent sur le monde. Je ne connais pas d'autre RPG où il est possible de libérer un pays, ville après ville, d'une occupation, ou à l'inverse, d'être un collabo qui liquidera la résistance. Et qui selon ses actes sera admiré ou pourchassé selon là où il se rend. Vous avez déjà eu l'impression que quiconque en avait quelque chose à fiche de vos hauts faits, dans un Elder Scrolls ?
Je passe sur le fait que contrairement aussi à ce qu'on peut voir dans un Elder Scrolls, votre personnage souffre de la chaleur et du froid, et qu'un terrain très en pente l'essouffle assez vite... et qu'arriver vivant d'une ville à une autre est, au début du jeu, un putain de challenge. Ma découverte inattendue de Geldern, en pleine nuit, sous la pluie, courant comme un dératé parce que poursuivi par des gobelins, restera pour moi un très grand moment d'émotion – oui, d'émotion – vidéoludique. Je n'ai pas souvenir d'une expérience pareille dans (le néanmoins sympathique) Oblivion.
NEO Scavenger a manifestement le choix de la difficulté extrême et c'est la raison pour laquelle je ne pense pas insister beaucoup – disons que je réessaierai de temps en temps, mais les jeux impitoyables ont sur moi un effet décourageant, démotivant. Néanmoins, une trouvaille magnifique ici : les combats qui, contrairement à l'immense majorité des jeux, ne reposent pas grosso modo sur l'alternance attaque/parade, mais incluent la couverture, la fuite (on ne peut PAS fuir dans un Avernum, par exemple, et bien que j'adore cette série, c'est totalement consternant), l'attaque bersek ou prudente, ramper au sol si l'on est tombé, ou bien en profiter pour faucher les jambes de son adversaire – et même le menacer ou appeler à l'apaisement. Bref une vision plus narrative que mathématique des combats, dont je compte m'inspirer sans vergogne.