samedi 18 janvier 2025

Dismal failure

Solitary Stars likely marks the end of my (modest) "career" in interactive fiction, which consequently concludes not with a creative high point but with a sense of dismal failure, for which I am partly responsible – and partly not.

Azthath will (most probably) never exist – which means I’ve spent hundreds of hours working on it almost for nothing, except for the pleasure of creating a miniature world. I don’t regret doing it. It allowed me to dream intensely, and in any case, happiness is found in the struggle, not the victory, if I may use a martial metaphor. But the lack of time, energy, courage, and perhaps rigor undoubtedly contributed to me abandoning this project halfway through – a project in which I had invested immense hopes and equally immense (and probably excessive) ambition.

I’m currently working on an explorable map with the room descriptions I had written in the past, and perhaps a few random or time-evolving elements to give it a touch of life, but it won’t go any further. It won’t be a "game". There won’t be a "story".

This abandonment is also largely tied to the interactive fiction scene itself: there simply aren’t enough players, at least in the French-speaking community (I have to admit that my download stats on itch.io for my English-language games are a bit less disheartening). The fact that even my repeated attempts to find beta testers on various forums, in both languages, were met with indifference and silence was the final nail in the coffin. As a creative hobby, interactive fiction demands a huge amount of effort for an almost negligible outcome, and that’s a ratio I can no longer accept. I now need more immediate and rewarding forms of creation, like painting, making music, and writing – fictional, diaristic, or otherwise.

Ratage flasque

Astres Solitaires marque la fin probable de ma (modeste) "carrière" dans la fiction interactive, qui s'achève, par conséquent, non pas sur une apothéose créative mais sur une impression de ratage flasque, dont je suis en partie responsable, et en partie non.

Azthath n'existera (très probablement) jamais – et j'ai donc travaillé des centaines d'heures dessus quasiment pour rien, si ce n'est pour le plaisir d'avoir crée un monde miniature. Je ne regrette pas de l'avoir fait. Cela m'a permis de rêver à haute intensité, et de toute façons le bonheur se trouve dans la lutte, pas dans la victoire, si je peux utiliser une métaphore martiale. Mais le manque de temps, le manque d'énergie, le manque de courage, le manque de rigueur sans doute, ont sans doute contribué à ce que j'abandonne en cours de route ce projet au sujet duquel je nourrissais des espoirs énormes et une ambition non moins énorme – et probablement excessive.

Je travaille actuellement sur une map explorable avec les descriptions des rooms que j'avais rédigées autrefois, et peut-être quelques éléments aléatoires ou évoluant au fil du temps, pour rendre le truc un peu vivant, mais ça n'ira pas plus loin. Ce ne sera pas un "jeu". Il n'y aura pas de "scénario".

Cet abandon est également grandement lié au milieu même de la fiction interactive : il n'y a tout simplement pas assez de joueurs, en tous cas dans le milieu français (je dois admettre que mes statistiques de téléchargement sur itch.io, concernant mes jeux en anglais, sont un peu moins désolantes).

Le fait aussi que même mes tentatives réitérées, sur divers forums, de trouver des bêta-testeurs, dans les deux langues, n'aient été accueillies que par de l'indifférence et du silence, m'a achevé pour de bon.

Comme hobby créatif, la fiction interactive demande de gros efforts pour un résultat qui est donc quasi nul, et c'est un ratio qui ne me convient plus. Et j'ai besoin aujourd'hui de formes de création plus immédiates et gratifiantes, comme la peinture, la pratique musicale et l'écriture – fictionnelle, diaristique, etc.

vendredi 6 septembre 2024

Paper p0rn (english)

There's one thing I particularly like about Firewatch, which I replayed recently, and which I was keen to get back to after replaying Dishonored too: the manuscripts and printed matter scattered all over the place.

The omnipresence of paper and the written word.

Books. Filing cabinets. Personal letters and notes.

The visible, material, primary presence of information.

What could be more beautiful than a map annotated and expanded over the years and by contributors?

What could be more exciting than a binder full of secret information about things and people, as if life were a spy movie?

What could be cooler than a desk full of notes, diagrams, handwritten or typed letters, where you have your thoughts in front of you, unmediated and without the need for a machine?

*

I had my "Moleskine notebook" period 15 years ago, when I rediscovered the pleasure of scribbling, drawing, taking notes as I went along... Many of my notes on interactive fiction, music, literary texts and personal life decisions can be found there.

Nevertheless, since the early 2000s, we've moved into the world of e-mail, Google docs, Evernote and so on, for good and for ill.

I'd love to exchange letters, notes, sketches, annotated documents, with a few friends, about anything, no matter what, just for the pleasure of getting back to the written word for a while, to that thing that defines the human being almost as much as articulated language: the act of tracing signs by hand, understandable by others.

Nevertheless, I have to face the facts: it's all dead. A few weeks ago I started writing a letter, on paper, to a friend who runs a music label, with whom I chat regularly on Messenger and Telegram, and who shares – it's generational – my nostalgia for the good old days of letters and flyers, catalogs and paper in general. And I found myself, after two pages of disserting on the very meaning of sending letters to each other, plunged into an unbelievable depression that I only got rid of by tearing it all up and resolving to continue writing him e-mails or DMs.

*

On the other hand, it's possible for me to live out these paper fantasies in my private artistic life, to call it that; I already have a few filing cabinets at home, where I keep old notes, drawings, memos, scribbled addresses, photocopies of this or that - whether it concerns my musical life, the I.F. or anything else.

In the same way, I have a Filofax where I record the masses I pay for this or that deceased person, this or that intention, and where I have as exaustive a listing as possible of all the people or groups of people I've come into contact with in my life, likely to be the subject of intentions for mass, prayer or fasting in their favor. I like to see a sheet of paper with names, dates and little boxes to tick. There's definitely something of a bureaucrat about me. I might as well put this aspect of my personality to good use in my spiritual and artistic life. Because life is both a game and a serious struggle, requiring method and documentation.

Paper p0rn (français)

Il y a une chose qui me plaît particulièrement dans Firewatch, auquel j'ai rejoué récemment, et que j'ai eu envie de retrouver après avoir rejoué aussi à Dishonored : les manuscrits et les imprimés, disséminés un peu partout.

L'omniprésence du papier et de l'écrit.

Les bouquins. Les classeurs. Les lettres et notes personnelles.

La présence visible, matérielle, primaire, de l'information.

Quoi de plus beau qu'une carte annotée et augmentée au fil des années et des contributeurs ?

Quoi de plus excitant qu'un classeur rempli d'informations secrètes sur des choses ou des personnes, comme si la vie était un film d'espionnage ?

Quoi de plus cool qu'un bureau chargé en notes, en schémas, en lettres manuscrites ou tapées à la machine, où l'on a, sans médiation, sans besoin d'aucune machine, sa pensée sous les yeux ?

*

J'ai eu ma période "carnets Moleskine" il y a 15 ans, période à laquelle j'ai retrouvé le plaisir de griffonner, de dessiner, de prendre des notes au fil de la pensée... Beaucoup de mes notes concernant mes fictions interactives, ma musique, mes textes littéraires ou mes décisions en matière de vie personnelle s'y trouvent.

Il n'empêche que nous avons, pour de bon, et pour le meilleur comme pour le pire, depuis le début des années 2000, basculé dans le monde des e-mails, de Google docs, d'Evernote, etc.

J'adorerais échanger des lettres, des notes, des croquis, des documents annotés, avec quelques amis, au sujet de n'importe quoi, peu importe, juste pour le plaisir de revenir un peu à l'écrit, à cette chose qui presque autant que le langage articulé définit l'humain : le fait de tracer des signes à la main, compréhensibles par d'autres.

Néanmoins je dois me rendre à l'évidence ; tout cela est mort. Il y a quelques semaines j'ai justement entamé une lettre, sur papier, à l'attention d'un ami, qui gère un label musical, avec qui je discute régulièrement sur Messenger et Telegram, et qui partage – c'est générationnel – ma nostalgie du bon vieux temps des lettres et des flyers, des catalogues, du papier en général. Et je me suis retrouvé, après deux pages à disserter sur le sens du fait même de s'envoyer des courriers, plongé dans une déprime invraisemblable dont je ne me suis débarassé qu'en déchirant tout ça et en me résolvant à continuer à lui écrire des mails ou des DM.

*

En revanche il m'est possible de vivre ces fantasmes de papier dans ma vie artistique privée, pour appeler ça comme ça ; j'ai quelques classeurs chez moi, déjà, ou je garde de vieilles notes, des dessins, des mémos, des adresses griffonées, des photocopies de ceci ou cela – que cela concerne ma vie musicale, l'I.F ou n'importe quoi d'autre.

De la même manière, je possède un Filofax où je consigne les messes que je paie pour tel ou tel défunt, telle ou telle intention, et où j'ai un listing aussi exaustif que possible de toutes les personnes ou groupes de personnes que j'ai approchés dans ma vie, susceptibles de faire l'objet d'intentions de messe, de prière, ou de jeûne en leur faveur. J'aime voir une feuille de classeur comportant des noms, des dates, de petites cases à cocher. Indéniablement il y a quelque chose d'un bureaucrate en moi. Autant mettre cet aspect de ma personnalité au service de ma vie spirituelle et artistique. Car la vie est à la fois un jeu et un combat du plus grand sérieux, qui nécessite méthode et documentation.